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10/10/2014

Bestaire : Le Bourdon

Causerie littéraire :

Ahemm...
Je vous remercie de m'avoir invité pour la conférence plénière "Bestiaire(s)". Lorsque Jean-François m'a demandé de faire la conférence d'ouverture de votre colloque, j'ai accepté avec plaisir, d'autant plus que je n'avais rien à dire des bêtes, ni des bestiaires et encore moins du bourdon. 

J'allais donc parler du bourdon, ce m'allait bien, puisqu’à ce moment-là, je ne l'avais pas.

Mais le bourdon a ceci d'extraordinaire que tant que vous n'y pensez pas, tant qu'il est insu de vous, il n'existe pas à vos yeux, il ne prend aucune place dans votre conscience. 

Dès lors que vus le nommez, que vous lui prêtez une existence, c'est la fameuse métaphore ontologique qui fait venir à l'être (et donc à la conscience) quelque chose qui existait et qui n'avait pas encore fait l'objet d'une "nomination adamique", quelque chose qui n'avait pas encore été nommé, à la manière dont Adam avait nommé les animaux de la terre, ce qui lui permit de pouvoir en parler (Nous sommes ici dans une fable, un conte mythique d'une naissance du langage inlassablement questionnée). 

Sans nomination adamique, un phénomène peut exister dans le réel sans jamais avoir été relevé. On ne peut pas en avoir conscience, puisque personne n'en parle. Dans le cas du bourdon, dans son sens métaphorique de "cafard", de "blues" ou d'"idées noires", le phénomène est reconnu. Il est connu. Mais on peut ne pas se sentir concerné parce que l'on a pris l'habitude de ne pas y prendre garde et de penser qu'il ne s'agit pas de soi. 

En acceptant, dans le cadre du colloque "Bestiaire" de parler du bourdon, j'acceptais de parler d'un animal pour lequel je n'avais qu'indifférence. Aucune animosité, ni passion secrète. Tout juste un léger agacement lorsque l'un d'entre venait voleter auprès de moi. Très tôt, j'avais appris à ne pas craindre les insectes. Il suffit de les ignorer pour qu'ils se lassent. Et l'on sait que le bourdon ne pique pas. Il n'est qu'un importun des repas d'été en plein soleil, parmi les jardins et les prés en pleine floraison.



© Simone Rinzler | 9 octobre 2014 – Tous droits réservés
 









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